Carnet de bord

Partie le samedi 1er février par le TGV de 6H je décolle de Roissy vers midi pour New-York. Là je retrouve Josselin, un jeune français qui habite Londres et embarque lui aussi dimanche à Portobelo pour les San Blas avec Benoit. Vol pour Panama où nous arrivons peu avant minuit. Carlos, un chauffeur de taxi que Fabio a rencontré lors d’un précédant voyage, nous attend et nous emmène à l’EUROTEL où nous avons réservé nos chambres. Pas de chance, plus de chambre libre ! Carlos nous emmène alors à l’hôtel Caracas. Ma chambre donne sur une grande avenue et les bus locaux font un bruit épouvantable !

Le lendemain dimanche, Carlos nous emmène tous les deux en taxi vers Portobelo. Nous passons d’abord au magasin de bricolage chercher des bouteilles de gaz et au supermarché faire quelques courses pour fabio. Deux heures de route et nous voilà à Portobelo vers 13H30. C’est une petite bourgade au bord d’une baie autrefois défendue par de belles fortifications. Fabio vient me chercher au ponton avec l'annexe. Je découvre un superbe bateau rutilant… j’espère que le capitaine n’est pas trop maniaque !!! Nous arpentons Portobelo à la recherche de Benoit que nous croisons sur la grande place. Nous déjeunons tous les quatre au restaurant d’un excellent poisson arrosé de bières bien fraîches. Nous passons l’après-midi à flâner dans les rues animées par le carnaval. Le soir nous dinons tous les quatre à bord de WinDancer et nous dégustons le foie gras et le Jurançon que j’ai apportés. Fabio et Benoit échangent sur les San Blas où tous deux naviguent depuis déjà quelques temps. Je m’installe dans la grande cabine avant qui dispose d’un cabinet de toilette privé : le luxe. Première nuit à bord… gros dodo bien mérité après tout ce voyage !

Lundi (le 4), réveil en douceur et petit déj en tête à tête où nous faisons connaissance. L’eau de la baie n’incite pas à la baignade, tant pis j’attendrai. Nous appareillons vers 11H pour une première escale à l’Ile Grande. Nav au moteur car on a le vent dans le nez. Petite virée jusqu’à une plage très fréquentée mais fort agréable. Au retour nous accostons sur une île au milieu de la baie : des singes y vivent et l’un d’eux n’apprécie guère que je le prenne en photo. Il se dresse et me menace d’un bâton en montrant les dents… je recule sans demander mon reste ! Fabio nous prépare d’excellentes pâtes et nous dinons en musique.

Mardi nous partons de bonne heure pour les San Blas. Le vent souffle un peu et une petite houle de deux mètres perturbe mon estomac… nouveau ça ?!... je mets cela sur le compte de la fatigue du voyage, de la soirée trop arrosée et du petit déj sans pain… Après une grande salade composée que je me force à avaler et une bonne sieste tout rentre dans l’ordre. Nous mouillons à  Chichimé en fin d’après-midi : bienvenus au paradis ! Je peux enfin plonger dans cette eau si attirante et ce décor de rêve !

Mercredi farniente à Chichimé sous un beau soleil. Une barque épicerie nous approvisionne en légumes et nous vend une précieuse brique de lait (pour mon acfé du matin...) Fabio prépare un gaspacho géant qu’il met au congélateur. Première séance PMT (palme Masque Tuba) pour admirer les poissons à proximité d’un îlot rocailleux… l’impression fabuleuse d’être dans un aquarium ! Soirée agréable qui incite Fabio à entamer la bouteille d’Aberlour que je lui ai apportée… visiblement il apprécie…

Jeudi nous partons pour Nargana rejoindre les amis italiens de Fabio : ils doivent l’aider à recharger sa bouteille de gaz qui menace de nous lâcher. Nous découvrons la principale ville Kunas : les huttes se pressent les unes contre les autres. Pourquoi cette surpopulation au milieu de cette nature déserte ? Nous arpentons les rues. Les kunas nous accueillent avec un large sourire et nous saluent tous d’un « ola ». Les enfants veulent que je les prenne en photo et rient de se voir sur l’écran ! Tous semblent joyeux, paisibles et bien dans leur peau. Les jeunes s’habillent à l’européenne (les gars ont même le jean en bas des fesses !...) et les femmes plus âgées conservent leur costume traditionnel très coloré : paréo autour des hanches, bracelets de perles des chevilles au mollet, foulard et molas en guise de chemisier.

La matinée du vendredi se passe en logistique : Fabio va voir ses amis pour recharger les bouteilles de gaz. Mais il ne parvient pas à réamorcer. Lorenzo vient l’aider et ça marche enfin ! En début d’après-midi nous repartons vers des îles désertes dont j’ai oublié le nom. Nous peinons à trouver l’entrée du mouillage… une grande heure à tourner à la recherche du passage. Nous réaliserons le lendemain que nous nous sommes trompés d’île… Quoi qu’il en soit, la carte est fausse et le tracé de la route passe sur un haut fond infranchissable. Nous voilà au bout du monde avec seulement deux autres bateaux… excitant et inquiétant à la fois ! Eh oui, JE suis là, sur ces îles désertes à l’autre bout du monde !!! Impression irréelle… j’avoue : je suis fière de moi d’avoir réussi à vivre cette expérience insolite. Le ciel se dégage et nous allons sur l’île pour nous baigner, seuls au monde. Fabio ramasse une noix de coco (c’est pas bien ça !!) mais il s’échine pour rien à la décortiquer, elle est vide… J’ai apporté deux livres de cuisine mini format où nous puisons une excellente recette pour le diner.

Depuis notre départ de Nargana le temps se gâte et le ciel se couvre de gros nuages… quelques grains lavent le pont et m’obligent à fermer dare-dare mon hublot.

Le lendemain samedi nous profitons du temps très gris pour faire un grand ménage et laver le pont. Vers midi nous sommes rejoints par des amis italiens. Claudio nous emmène pour une partie de pêche sous-marine près de la barrière de corail… fabuleux… les plus beaux fonds que nous aurons l’occasion de voir aux San Blas. Je me baigne en jean et T-shirt car j’ai bien rougi le matin en brossant le pont en maillot de bain. Je parviens à remonter seule dans l’annexe : hourra ! Claudio nous donne un gros poisson pour le diner.

Dimanche, réveil sous la grisaille. Après une matinée bricolage pour Fabio et farniente pour moi, nous levons l’ancre pour Cayes Hollandes : une petite nav au près serré par petit vent. Quelques rayons de soleil percent enfin les nuages et le beau temps revient. Nous mouillons près d’une île habitée par deux familles kunas. Cette fois nous sommes moins isolés car le mouillage est assez fréquenté. Nous retrouvons Lorenzo et sa jeune amie colombienne sur son cata.

Lundi le soleil redevient plus généreux. Nous accostons sur l’île Banedup avec Lorenzo et son amie. Les enfants nous accueillent joyeusement et la maman, qui parle un peu espagnol, nous montre comment faire du lait de coco. Nous restons un bon moment à bavarder avec cette famille. Les enfants nous accompagnent dans notre tour de l’île et sont ravis de poser pour une séance photos… rires joyeux ! Après une sieste bien méritée (hum) nous partons nous baigner dans les fameuses « piscines ». Nous accostons sur un îlot désert où nous sommes accueillis par un chien qui nous fait faire le tour du propriétaire. L’eau est d’un bleu stupéfiant mais pas de poissons en vue sur ce sol sablonneux. Le temps de rentrer au bateau et c’est la douche naturelle ! Soirée DVD (L’auberge espagnole de Klapich) pour revenir à des loisirs plus « civilisés »

Mardi, après un réveil sous la grisaille qui incite à la grasse mat’, le soleil se montre enfin. Nous repassons donner les photos à nos amis kunas et ils nous vendent un filet plein de langoustes. Pendant que Fabio les emporte au bateau, je reste seule avec les enfants et nous faisons un château de sable… je me demande ce que cela peut bien représenter pour eux… Dans l’après-midi le ciel est tout bleu et nous partons explorer les îles alentour et les fonds sous-marins. L’eau est d’une limpidité incroyable et prend des couleurs inouïes : bleu lagon, vert d’eau, bleu roi, bleu nuit, vert émeraude voire vert kaki et même violet par moment ! Notre baignade s’achève abruptement par l’irruption d’un requin attiré par l’appât que Fabio lance à un barracuda qu’il prend en chasse… Ensuite nous nous baignons dans une piscine fabuleuse, bordée de cocotiers, avec le bruit des vagues qui se brisent sur la barrière de corail non loin de nous. L’eau est fraiche et translucide et nous restons là, ballotés par le courant, à savourer le bonheur d’une baignade dans cet endroit de toute beauté. Le thermomètre grimpe à 32° ! Pendant que Fabio prépare le diner, des femmes kunas viennent me vendre des molas. Fabio me donne l’idée d’en faire un coussin et je craque pour un motif traditionnel de faucon qui rappelle les dessins aztèques.

Mercredi, après un bain solitaire dans « ma » piscine et des achats à la pirogue ambulante, nous repartons pour Coco Banderas. Nous découvrons trois îlots déserts magnifiques. L’un est le royaume des italiens, l’autre celui des anglophones. Nous saluons Rita et Enzo, un charmant couple d’italiens avec qui Fabio converse par radio depuis un bon moment. Ravis de se rencontrer enfin, ils bavardent longuement sur la plage. Pendant ce temps je vais admirer les poissons : je découvre un fabuleux poisson perroquet. Rita et Enzo viennent prendre l’apéritif à bord : heureusement ils parlent bien français.

Jeudi (15) le temps se dégrade. La nuit a été très pluvieuse et le vent a soufflé fort. En fin de matinée le ciel se dégage et nous allons sur l’île des italiens faire la lessive au puits puis nous baigner dans cette piscine naturelle absolument fabuleuse : sable très fin et eau d’un bleu turquoise indescriptible. Je craque pour cet endroit merveilleux. J’y reviendrai un jour, il le faut, peut-être pour un réveillon du nouvel an car les italiens ont aménagé un coin barbecue et s’y retrouvent chaque fin d’année pour une joyeuse fête. Moi qui rêve de fêtes de fin d’année sous le soleil… La journée passe tranquillement entre baignades, sieste après la soupe de poisson et discussions avec nos voisins : des afrikaners partis en famille pour un an, des anglais du bateau « unplugged » que Fabio a déjà rencontrés au Venezuela. Nous allons prendre l’apéritif sur le bateau de Rita et Enzo. Menu du jour, midi et soir : langoustes… encore !

Vendredi matin Enzo et Rita nous initient à la pêche au filet. Nous rentrons avec un seau plein d’alevins que nous nettoyons sur la plage arrière les pieds dans l’eau. Nous manquons passer la nuit sur un minuscule îlot serti de trois cocotiers que nous explorons tandis que l’annexe part à la dérive toute seule… mais nous avons la chance d’être secourus très vite par Enzo et Rita ! Nous rendons une visite de courtoisie à l’île des britishs où trois couples d’un certain âge - style américain moyen bien pantouflard que l’on imagine à jardiner ou devant sa télé - prennent le thé et jouent aux dés… on se croirait dans le jardin d’une paisible maison de retraite… impression surréaliste en cet endroit au bout du monde ! Je regarde, nostalgique et envieuse, Enzo et Rita faire le tour de « leur » île au soleil couchant, main dans la main. Fabio va offrir une bonne bouteille de vin à Enzo en remerciement. Soirée DVD pluvieuse.

Samedi, malgré le temps gris je me décide à profiter d’un dernier bain dans la piscine coup de cœur de l’île italienne. Un kuna nous vend une énorme araignée pour un dollar. Je fais mes adieux à Enzo et Rita en leur souhaitant encore de nombreuses années de bonheur. Nous repartons vers la civilisation. Nous rejoignons Nuduldup, un autre village près de la côte, resté plus traditionnel. Les cases se jouxtent et envahissent tout l’espace. Nous souhaitons faire une excursion sur la rivière. Enzo nous a recommandé de nous adresser à Lisa. Coup de chance, Alex, le jeune kuna qui nous aide à accoster au ponton, nous mène à elle. La sortie en pirogue est impossible à deux. Nous discutons et je lui achète un mola plus coloré. Elle nous propose une marche en forêt le lendemain matin avec Alex. Nous nous attardons ensuite autour du terrain de basket où se déroule un important tournoi. Le village est en effervescence. Fabio discute avec les jeunes qui parlent espagnol et se montrent très curieux de nous.

Dimanche je me réveille de bonne heure et j’entends des applaudissements, des tambours, des cris émanant du village. Mais que diable font-ils de si bonne heure ?  Nous avons rendez-vous à 8H avec Alex. C’est la fête au village : un tournoi de basket – visiblement est le sport national ici - entre les meilleures équipes kunas. Dès le lever du jour tout le village se presse au bord du terrain : quelle ambiance ! Nous partons en balade avec Alex. Nous prenons l’annexe pour remonter la rivière jusqu’à un cimetière kuna où débute la piste vers la cascade. Trois heures de marche : la pluie et la transpiration se mélangent, ça grimpe ! Fabio en profite pour se renseigner sur leur mode de vie. Alex nous invite à participer le lendemain matin à la « chicha », fête où tout le village est invité à boire cet alcool généreusement offert par un notable. Nous restons donc malgré la pluie. Le soir nous dégustons cette énorme araignée.

Lundi matin nous débarquons de très bonne heure mais Alex nous a mal renseigné et la fête n’a lieu que le soir… le village est calme et la pluie tombe averse : difficile de nous promener. J’achète de jolies boucles d’oreilles pour Marion au magasin du village et nous quittons cette île sous une pluie battante. En nous éloignant de la côte le ciel se dégage… nous mouillons à Green Island sous une belle lumière. Je débarque sur l’île à la nage et fais la connaissance de deux familles françaises qui naviguent chacune avec un gamin de 5 et 7 ans. Celui de 7 ans n’a connu que ce mode de vie ! Les abords de l’île grouillent de poissons… hallucinant !! Une raie torpille frôle ma jambe tandis que je bavarde les pieds dans l’eau. Baignade autour du bateau pour éviter les requins. Le soir, alors que nous admirons les reflets de la pleine lune sur l’eau d’un beau gris argent, une grande raie passe à proximité du bateau. Instants magiques.

Mardi, après un dernier bain, nous faisons route vers Nargana où je dois prendre l’avion le lendemain matin. Fabio veut faire sans attendre le plein de gasoil et d’eau douce. Mon dernier après-midi se passe auprès de cette île où la baignade est impossible… Je suis triste de partir et Fabio est de mauvaise humeur… l’après-midi passe sans joie.

Mercredi Fabio me dépose à l’aéroport au lever du jour : une piste et une « guitoune »… des toilettes sur piloti au dessus de l’eau sur le modèle des WC de jardin d’autrefois… L’avion m’emporte vers Panama pour un brutal retour au monde civilisé. Le ciel est dégagé et les îles vertes entourées de leurs lagons turquoises se découpent dans la mer bleue. Je pars, le soleil est de retour... Adios Fabio !!! J’ai passé des moments inoubliables à ton bord… J’ai vécu la vie de marin au long cours, profité du temps qui passe, de la nature sauvage… Cette croisière me conforte dans mon projet de vie en mer.

Un taxi m’attend à l’aéroport de Panama et me dépose au "couette et café" El Litoral tenu par un charmant couple de canadiens. Surprise, Anne-Marie est métisse et parle avec un délicieux accent québécois. L’accueil est chaleureux. C’est une belle maison coloniale avec un jardin planté de grands arbres. Je flâne sous la tonnelle et finis par aller déjeuner dans la vieille ville. Tandis que je me balade sous une pluie battante il paraît qu’à l’hôtel il fait beau ! GRRRRR Le soir je vais dîner seule dans un excellent restaurant italien…

Jeudi je visite Panama en taxi. D’abord le fameux canal qui en fait me déçoit beaucoup. Ensuite Victor me fait monter sur la colline d’Ançon d’où on a une belle vue sur la ville. Là encore je suis déçue car cela ne vaut pas l’arrivée de la veille en avion sous un grand soleil. Ensuite il me mène aux trois îles dans la baie… décevantes elles aussi. Je finis la journée tranquille dans le jardin. Le soir je vais diner – italien une fois de plus - avec un couple de français très agréable accompagnés de leur petit garçon d’origine guatémaltèque. Dernière soirée très sympathique à échanger nos impressions sur Panama.

Vendredi le taxi m’emmène à l’aéroport pour un décollage à 10H. Longue escale à Houston, aéroport immense et quasiment vide. Après une brève nuit à bord c’est l’arrivée samedi en fin de matinée à Roissy qui grouille de monde. Marion m’accueille à la gare à 16H. Bonheur de la revoir. Elle a bien vécu ces trois semaines d’absence… elle grandit…

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